Portrait d’un métier : Fabrice Cazaban et le Contract Management

Fabrice Cazaban

Directeur Adjoint du Pole Montage au sein du Conseil d’Egis, Fabrice Cazaban travaille à développer les missions de conseil en ingénierie contractuelle, et tout particulièrement en matière de Contract Management.

 

#1 Le Contract Management, concrètement, c’est quoi ?

Il existe des définitions académiques, mais pour faire simple, c’est l’art de manier et d’instrumentaliser les clauses d’un contrat afin de réaliser un projet. Il s’agit d’appréhender le contrat, non comme une règle figée et autoporteuse, mais comme un outil de réalisation du projet, le contract manager étant, dans une équipe projet, le spécialiste de cet outil. Il contribue au management du projet par le prisme du contrat. Concrètement, il est essentiellement impliqué dans la formalisation des différents écrits qui jalonnent la vie du contrat (courriers, ordres de services, fiches de modification, avenants), assure la traçabilité de son exécution, et intervient systématiquement dans la gestion des risques, aléas et écarts par rapport aux prévisions initiales. En somme, il suit, structure et sécurise le pilotage contractuel du projet.

 

#2 Quel est le cycle de vie d’un contrat ?

La vie d’un contrat commence le jour de sa signature par les parties ; c’est sa date de naissance.  Mais avant cela, le futur contrat se pense et se conçoit, s’écrit et se discute. Cette « période de gestation » pré-contractuelle est structurante car elle détermine la viabilité, l’équilibre et la robustesse du contrat.

Une fois signé, le contrat va vivre, ou plus exactement, les parties vont faire vivre ce contrat, en s’y référant, en l’appliquant, en l’invoquant, voire en s’en écartant ou en le modifiant. Loin d’être statique et écrite à l’avance, la vie du contrat est, à l’instar du projet, pleine de péripéties et nécessite une vigilance de tous les instants.

Enfin, le contrat s’éteint lorsque son objet est réalisé, mais cette fin de vie se prolonge souvent dans le temps. Pour prendre l’exemple des contrats de travaux, une fois l’ouvrage réceptionné (ce qui marque théoriquement la fin des rapports contractuels), il reste encore à parachever l’ouvrage par la levée des réserves et la mise en jeu des garanties, à faire les comptes finaux pour régler le solde, et par là même, à trancher les différends qui n’auront pas trouvé d’issue en cours d’exécution. La réussite de cette phase critique et finale d’atterrissage financier du contrat dépendra en grande partie de la maîtrise du pilotage du contrat pendant tout son cycle de vie.

 

#3 Quelques chiffres pour évaluer l’impact du Contract Management sur un projet ?

La valeur ajoutée de l’intervention d’un contract manager sur un projet est difficilement chiffrable. Il est en effet peu évident de valoriser les gains, ou l’absence de perte, qui résulteraient directement de l’action d’un contract manager qui aurait su, par exemple, identifier, caractériser et neutraliser un risque en temps utile et en bonne et due forme. Ce qui est certain, c’est que le bénéfice de l’intervention d’un contract manager ne peut s’exprimer que sur le long terme, et s’il intervient très tôt et en continuité dans tout le cycle de vie contractuel.

La mobilisation d’un contract manager dès le début du projet, pour des effets perceptibles en fin de projet, répond donc clairement à une logique d’investissement qu’il n’est pas toujours aisé d’engager. Ceci étant, plus l’envergure et le niveau de risque d’un projet sont importants, plus le déploiement d’une démarche de contract management sera vertueuse, limitant les risques et les surcoûts.

 

#4 Le Contract Management : un nouveau métier ?

Ce n’est pas un nouveau métier, mais un métier qui connait, en France, un renouveau et un certain essor. En effet, de plus en plus d’entreprises et de maîtres d’ouvrage intègrent dans leurs organisations des équipes dédiées au contract management, dont la fonction spécifique est clairement identifiée. Parallèlement, ce métier se structure au travers de nombreuses publications et de la création récente d’associations professionnelles, de formations diplômantes. Les offres d’emploi en la matière laissent également percevoir l’engouement qu’il peut y avoir actuellement sur ce métier, qui n’est cependant pas nouveau.

 

#5 Comment nous appréhendons le Contract Management chez Egis ?

Nous l’appréhendons de deux manières ; d’une part comme un outil de gestion interne des contrats du groupe Egis, et d’autre part, comme une offre de services à nos clients, pour la gestion de leurs contrats, dans différents contexte (MOE, AMO, mandat..). Sur la première approche, il convient de souligner que le contract management des contrats Egis est assuré au premier chef par les Directeurs de Projet, avec le cas échéant, l’appui de la direction juridique du groupe. En ce qui concerne l’offre de services en contract management, de nombreuses BU du groupe y concourent, en France comme à l’international, le Conseil d’Egis tendant pour sa part à se spécialiser davantage (mais pas exclusivement) sur le marché français.

 

#6 Le Conseil en Contract Management, une expertise du Conseil d’Egis ?

Assurément ! En matière d’Ingénierie contractuelle, l’offre de services la BU CONSEIL se concentrait initialement sur les études amont de montage contractuel, de stratégie d’achats et d’allotissement, ainsi que sur des missions d’assistance à maîtrise d’ouvrage pour la rédaction et la passation de contrats complexes. Mais depuis plusieurs années, nous avons multiplié les missions de conseil en contract management pour accompagner des maîtres d’ouvrage, sur un temps long, dans la conduite et le pilotage stratégique des contrats qui structurent leurs projets. Nous avons ainsi capitalisé de nombreux retours d’expériences dans différents domaines, développé des outils, méthodes et réflexes qui nous permettent désormais de proposer à nos clients cette expertise singulière et à part entière, au croisement du juridique, du management de projet et de la technique.

 

#7 Quel profil et compétences requises pour exercer ce métier ?

Il n’existe pas un profil type, mais il est certain qu’il faut avoir une certaine affinité avec la « chose contractuelle » ; savoir lire et auditer un contrat, identifier ses forces et faiblesses, peser et sous-peser le poids de chacun des mots qui en ponctuent les clauses, confronter ses dispositions et ses pièces pour en éprouver la solidité et la cohérence, et sur cette base, définir une stratégie, un mode opératoire, un argumentaire…

Tout cela exige de fortes capacités d’analyse, de grandes qualités rédactionnelles, une bonne dose de pragmatisme et d’assertivité, ainsi qu’une certaine agilité pour être à même d’intégrer à l’expertise contractuelle, une compréhension des enjeux techniques, délais, financiers, commerciaux.

Véritables « moutons à cinq pattes », les profils sur cette fonction transverse et opérationnelle, sont hybrides, provenant essentiellement, selon une étude réalisée par l’Association Française de Contract Management (AFCM), des filières juridiques (50.7 %) et techniques (27.2 %).

 

 

Photo © Mari Helin – Unsplash

 

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